La protection d'un ouvrage historique par le droit d'auteur nécessite d'apporter la preuve de son originalité, ce qui implique de démontrer précisément qu'il fait apparaître l'empreinte de la personnalité de son auteur.
L'éditeur Elkarlanean publie en 1998 un ouvrage intitulé « Histoire générale du Pays basque : Epoque romaine-Moyen âge ». Quelques années plus tard, en 2016, l'éditeur Geste publie un ouvrage intitulé « Histoire du pays basque ». Estimant que ce dernier ouvrage reprend plusieurs textes et cartographies de son livre, Elkarlanean a assigné Geste pour contrefaçon de droits d'auteur. Le tribunal de premier instance a rendu jugement déboutant Elkarlanean de ses demandes, considérant que son livre n'est pas original. L'éditeur a alors interjeté appel.
La nécessité de démontrer précisément l'originalité
Dans son arrêt (1), la Cour d'appel commence par rappeler qu'un récit historique est bien « susceptible de constituer une oeuvre de l'esprit protégée par le droit d'auteur, à la condition qu'il révèle l'empreinte de la personnalité de son auteur, permettant de caractériser l'originalité ». La preuve de l'originalité doit alors être rapportée par la personne qui revendique la protection, en l'espèce la maison d'édition Elkarlanean.
La Cour d'appel considère néanmoins que l'éditeur n'a fait qu'affirmer l'originalité de son livre, sans réussir à la démontrer. Elle relève également différents éléments avancés par Elkarlanean qui ne peuvent pas fonder l'existence d'une originalité :
Le fait de ne pas se contenter de reproduire les travaux d'autres historiens ou de développer une approche qui n'est pas partagée par tous - l'originalité ne devant pas être confondue avec la nouveauté ;
Les compétences de l'auteur, sa notoriété ou son mérite ;
Le style accessible et pédagogique de l'auteur.
En outre, la Cour d'appel constate que les nombreuses références figurant en note de bas de page de l'ouvrage montrent que l'auteur « s'est lui-même fondé sur les recherches et publications de nombreux historiens des XIXème et XXème siècles, ainsi que sur des écrits historiques plus anciens ».
Ainsi, à défaut d'originalité, la Cour d'appel confirme le jugement de première instance et rejette l'action en contrefaçon.
On comprend ici que la difficulté tient du fait que, comme le rappelle la Cour d'appel « l'histoire elle-même et les faits historiques ne sont pas protégeables par le droit d'auteur, sauf à présenter une particulière originalité, cette condition étant d'appréciation stricte par les juridictions ». Alors que s'il s'agissait par exemple d'un roman ou d'un recueil de poème, le contexte serait tout à fait différent. Mais, en matière de faits historiques, l'appréciation de l'originalité est beaucoup plus rigoureuse.
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